Bien que l’humanité ait conscience de sa dépendance envers l’eau depuis longtemps, nous nous rendons compte que l’offre n’est pas illimitée, et que nous dévons l’apprécier en conséquence. L’ISSeP, acteur en tant que sentinelle de l’environnement, satisfait aux exigences des autorités (régionales, fédérales, européennes) et contribue à l’effort de mise en œuvre de la DCE en assurant l’exploitation des réseaux de surveillance des masses d’eau. L’ISSeP prend en charge les prélèvements, les analyses physico-chimiques, microbiologiques et la caractérisation écotoxicologique d’échantillons aqueux de différents types. Cette expertise est valorisée par ailleurs dans le cadre de la mission de Laboratoire de Référence en matière d’eau, dans la mise en œuvre de nouvelles méthodes analytiques et dans le cadre de projets de recherche. La pollution et la rareté de l’eau menacent la santé et la qualité de la vie de l’homme. Mais, des préoccupations écologiques plus larges entrent également en ligne de compte. Une pénurie d’eau de qualité nuit aux environnements aquatiques, terrestres et à ceux des zones humides en exerçant une pression supplémentaire sur la faune et la flore, qui subissent déjà les conséquences de l’urbanisation et le changement climatique. La gestion de l’eau est liée à de nombreuses politiques. L’intégration est la seule voie possible pour garantir la durabilité de l’eau. C’est pourquoi, en Europe, la Directive 2000/60/CE (Directive Cadre Eau ou DCE) et ses directives-filles concernent l’ensemble des aspects de l’utilisation et de la consommation d’eau. Celles-ci ont pour objet la prévention, la préservation et l’amélioration des écosystèmes aquatiques ainsi que la réduction et la prévention de la pollution et la surexploitation des eaux souterraines. Ensemble, menons tous ces efforts pour atteindre une protection maximale de la biodiversité qui nous entoure.
Le réseau wallon de contrôle de la qualité physico-chimique des eaux de surface comporte près de 400 points de prélèvement répartis sur l’ensemble des15 sous-bassins hydrographiques définis dans l’arrêté du Gouvernement wallon du 13 septembre 2001 délimitant les bassins hydrographiques et sous-bassins hydrographiques en Région wallonne (AGW 13/09/2001).
Afin de suivre l’état écologique et l’état chimique des eaux de surface conformément à la Directive 2000/60/CE, dite Directive cadre sur l’Eau (DCE), le programme de surveillance présente quatre types de contrôles, chacun de ces types répondant à des objectifs particuliers :
- Le contrôle de surveillance est un contrôle global, destiné à donner l’image de l’état général des masses d’eau (notamment à l’échelle européenne) et à refléter son évolution à long terme.
- Le contrôle opérationnel a pour objectif principal d’assurer le suivi de toutes les masses d’eau identifiées comme risquant de ne pas répondre aux objectifs environnementaux, notamment en évaluant l’efficacité des actions mises en place dans le cadre des plans de gestion.
- Le contrôle d’enquête s’exerce ponctuellement là où les raisons de la non-atteinte des objectifs restent inconnues mais permet également de déterminer l’ampleur et l’incidence de pollutions accidentelles.
- Le contrôle additionnel s’exerce sur les masses d’eau qui ne sont pas à risque, pour la surveillance des zones protégées (les points de captage d’eau, les zones Natura 2000…)
La fréquence et la périodicité de visite d’un site varie d’un site à l’autre.
De manière générale, les sites du contrôle de surveillance sont visités 13 fois tous les ans tandis que les sites des contrôles opérationnels et additionnels sont prélevés de 6 à 13 fois tous les 3 ans.
Les contrôles d’enquête sont ponctuels (limités dans le temps et l’espace).
Le programme analytique du réseau eaux de surface (ESU) est défini annuellement par la SPW ARNE (liste des points, listes des paramètres par point et fréquence de prélèvement pour chaque point).
Il présente :
- Des paramètres généraux liés au prélèvement ;
- des macropolluants comme les métaux majeurs ;
- des nutriments ;
- et des micropolluants minéraux et organiques.
L’ensemble des paramètres prévus par la directive est normalement prévu au moins sur les sites de surveillance (paramètres répartis entre les matrices ESU et biotes).
Pour les autres sites, le programme est défini en fonction de l’état de la masse d’eau.
Les données physico-chimiques sont transmises au SPW ARNE qui compile les données physico-chimiques (ESU + biotes), biologiques (données du DEMNA), débit … afin d’évaluer l’état des masses d’eau et de définir les plans d’action pour atteindre ou conserver les objectifs de bon état.
L’ISSeP assume, également, la mission de surveillance de la qualité des eaux souterraines patrimoniales pour le compte du SPW ARNE.
Ce réseau de surveillance se décline en deux thématiques principales :
- le volet qualitatif ;
- le volet quantitatif.
Le volet qualitatif concerne des prélèvements d’eau sur lesquels sont effectuées à différentes fréquences, soit des analyses complètes de type SEQ-ESO (Système d’évaluation de la qualité des eaux souterraines), soit des analyses plus thématiques comme par exemple les nitrates.
Certains sites, réputés sensibles, doivent être suivis en continu sur quelques paramètres physico-chimiques simples (pH, t°, conductivité, pression, turbidité, fluorescence). Ces sites sont alors équipés de moniteurs permettant ce suivi.
Des résurgences, réputées sensibles, sont suivies en continu sur quelques paramètres physico-chimiques simples.
Le volet quantitatif concerne la mesure des niveaux piézométriques accessibles sur les ouvrages actifs et passifs, ainsi que la mesure du débit sur les sites naturellement actifs.
Eaux de piscine
L’ISSeP effectue le contrôle de l’autocontrôle des piscines wallonnes en coordination avec le Département de la Police et des Contrôles du Service Public de Wallonie (DPC). Outre la supervision administrative de l’établissement, le contrôle comprend des mesures in situ (chlore, pH…) et le prélèvement d’échantillons d’eau des bassins en vue de leur analyse en laboratoire pour les paramètres repris au niveau des arrêtés relatifs à la gestion des bassins de natation (M.B. 12.07.2013). Ponctuellement, la qualité de l’eau des douches est contrôlée pour la présence de Legionella pneumophila. Le dosage de la trichloramine dans l’air du hall des bassins est effectué en cas d’atmosphère « piquante » ou à la demande du Département de la Police et des Contrôles du Service Public de Wallonie (DPC).
Eaux de baignade
En période estivale, l’ISSeP assure également la surveillance de la qualité des eaux de baignade. Ce contrôle s’étale sur un minimum de 15 semaines, entre début mai et fin septembre. Pour toutes les zones, le contrôle porte sur les entérocoques intestinaux et Escherichia coli. Lors de dépassements ponctuels des normes de qualité reprises dans la directive européenne 2006/7/CE, un contrôle supplémentaire est effectué endéans les 72 heures du contrôle initial, afin de vérifier s’il s’agit d’une pollution à court terme éventuellement liée à des conditions climatiques défavorables
Pour les zones de baignade situées sur des plans d’eau, l’ISSeP assure le suivi des cyanobactéries (algues microscopiques) et des cyanotoxines qu’elles produisent dans certaines conditions. Le suivi des cyanobactéries est effectué par le dosage de la chlorophylle A, (évaluation de la biomasse) et l’identification par microscopie optique des genres de cyanobactéries potentiellement productrices de toxines. Le dosage des microcystines est réalisé par la technique Elisa.
Au cours de la saison et à la demande de la RW l’ISSeP peut utiliser des échantillonneurs automatiques pour évaluer l’impact de la proximité de STEP, de périodes de sécheresse, d’évènements orageux, … Ces équipements, enclenchés à échantillonnent toutes les 2 heures. Les échantillons ainsi collectés sont analysés pour les entérocoques intestinaux et Escherichia coli.
Effluents industriels
Parmi les effluents industriels ou les rejets de stations d’épuration sélectionnés par le SPW ARNE, les substance prioritaires et prioritaires dangereuses font l’objet d’un inventaire spécifique pour répondre aux prescriptions de la directive Normes de Qualité Environnementale (NQE), directive fille de la directive-cadre sur l’eau. Toutes ces informations permettent notamment une meilleure prise en compte des objectifs à atteindre pour le bon état des masses d’eau et constituent une aide précieuse à la décision lors de la révision des permis d’environnement des entreprises.
L’ISSeP met en œuvre une batterie d’essais physico-chimique mais aussi des bio-essais (bactéries, algues, rotifères, daphnies, YES/YAS tests) pour évaluer l’impact sur les écosystèmes d’une série de rejets d’eaux usées industrielles complexes dont le potentiel toxique et le débit sont importants. Ces rejets sont désignés par le SPW-ARNE. Les masses d’eau réceptrices sont également suivies.
Les bio-essais sont de très bons outils pour évaluer l’efficacité des mesures (actions) prises dans le cadre des plans de gestion au niveau des rejets industriels ou autres. Ils permettent aux différentes parties (Administration, Industriels…) d’estimer et de visualiser le résultat des efforts accomplis (action du programme de mesure), et ce, directement sur des organismes biologiques caractéristiques du milieu récepteur ainsi que de différents niveaux trophiques des écosystèmes aquatiques. Certains bio-essais (YES-YAS) sont déployés en vue de déterminer les activités (anti-) ostrogéniques et (anti-) androgéniques des échantillons (eaux de surface et rejets). Ils constituent des outils de screening très pertinents de la présence de perturbateurs endocriniens qui sont une source de préoccupation croissante pour les gestionnaires publics et pour l’Union européenne.
Tours aéroréfrigérantes.
L’ISSeP effectue le contrôle de tours aéroréfrigérées situées dans des entreprises en coordination avec le Département de la Police et des Contrôles du Service Public de Wallonie (DPC). Le contrôle comprend l’analyse des légionnelles mais aussi des mesures in situ (Conductivité, turbidité, pH…) et le prélèvement d’échantillons d’eau.
Certaines substances très hydrophobes s’accumulent dans le biote (poissons et invertébrés évoluant dans les rivières) et sont difficilement détectables dans l’eau, même par les techniques d’analyse les plus avancées. Pour de telles substances, la directive 2013/39/UE a établit des Normes de Qualité Environnementale (NQE) qui s’appliquent aux biotes. Le monitoring des substances prioritaires sur cette matrice a donc été développé à l’ISSeP .
Le réseau « Biote » est mis en place avec pour objectif d’obtenir des données d’analyses dans les biotes pour toutes les masses d’eau de Wallonie, ainsi qu’un suivi temporel des résultats au niveau des stations de surveillance. Les poissons (chevaines, loches, goujons, brèmes, gobies ou chabots) et les invertébrés (crustacés ou mollusques) prélevés in situ sont analysés pour la recherche des substances prioritaires actuellement prévues par la directive NQE sur ces matrices (benzo-a-pyrène, fluoranthène, mercure, HCB, HCBD, PBDEs, heptachlore et heptachlore époxyde, dioxines et PCBs dioxin-like, PFOS, dicofol et HBCDD). Des invertébrés sont également introduits par encagement au niveau de certains sites où ces organismes sont absents.
Monitoring basé sur l’effet et les modes d’action de certaines familles de substances : biomarqueurs sur espèces sentinelles
La cellule Ecotoxicologie utilise le gammare (Gammarus pulex) en tant qu’espèce modèle pour le biomonitoring. En effet, l’utilisation des gammares présente un certain nombre d’avantages : ils sont abondants dans de nombreux cours d’eau et leur aire de répartition en Europe est très importante, ils sont sensibles à de nombreux polluants mais suffisamment résistants pour survivre lorsque ces polluants sont présents dans le milieu, leur cycle de vie est entièrement aquatique et, de plus, de nombreuses études bibliographiques sont disponibles à leur sujet. On peut les encager facilement in situ à partir de populations d’organismes issues de sites de référence. Outre le dosage de substances bioaccumulables (HAPs) réalisé dans ce biote, cet organisme est également utilisé pour le dosage de deux biomarqueurs : l’acétylcholinestérase (AChE) qui permet de détecter l’exposition des organismes aquatiques à des inhibiteurs tels que les pesticides neurotoxiques (les organophosphorés et les carbamates) et les glutathion-S-transférases (GSTs) qui entrent notamment dans le processus de détoxification de phase II des xénobiotiques hydrophobes (HAPs, PCBs, pesticides, ….). D’autres activités enzymatiques seront utilisées comme biomarqueurs dans un futur proche pour compléter l’outil. Le taux d’alimentation des gammares est également monitoré au cours des périodes d’encagement ou en laboratoire. Ce paramètre est en effet inhibé par une large gamme de contaminants (métaux lourds, biocides, médicaments et autres composés organiques) et renseigne donc sur l’état de santé des individus et donc du milieu.
Bioindication basée sur les macroinvertébrés et leurs traits biologiques, physiologiques et écologiques pour une approche triade.
L’utilisation complémentaire de bioindicateurs basés sur la composition des communautés de macroinvertébrés dans les rivières étudiées (recensement des taxons présents et de leur abondance afin de développer une approche triade) permet d’obtenir une vision globale (holistique) de l’état des cours d’eau considérés. En effet, pris séparément, chacun des volets constituant la triade (analyses chimiques, méthodes basées sur les effets, étude de l’impact sur les populations) fourni une information pertinente mais incomplète. La combinaison des trois approches et la mise en relation des résultats obtenus par chacune d’entre elles permet par contre de mieux définir l’impact des pressions qui s’exercent au niveau d’une station donnée en mettant en évidence les facteurs qui affectent le plus la qualité des écosystèmes considérés. Il deviendra ainsi possible d’identifier avec plus de certitude les causes d’une détérioration d’un écosystème (poids de l’évidence) et d’agir plus efficacement pour réduire l’impact généré sur ce dernier. Les développements réalisés dans l’analyse synthétique des traits biologiques, physiologiques et écologiques de taxons débouchent sur des perspectives intéressantes pour la description et l’interprétation de la structure et du fonctionnement des écosystèmes aquatiques et pour l’évaluation de leur qualité biologique.
Toxicité des sédiments
Les sédiments sont le réservoir ultime de nombreux polluants chimiques d’origine ponctuelle (effluents industriels ou urbains, sites d’activité économique désaffectés) ou diffuse (pesticides d’origine agricole). Ils sont ainsi « mémoire » de la contamination. Inversement, ils peuvent également être source de contamination. Les bioessais sont très utiles pour l’évaluation de l’état réel des sédiments dans lesquels à la fois des contaminants connus et inconnus sont présents à des concentrations suffisantes pour entraîner une toxicité vis-à-vis des organismes testés. La combinaison de trois méthodes d’évaluation (chimique, par bioessais et écologique – approche « triade ») permet de donner une réponse qui ne pourrait être donnée par aucune des méthodes prises individuellement. Dans ce cadre, La Cellule Ecotoxicologie :
- réalise des essais sur sédiment entier avec des organismes inféodés aux sédiments ;
- applique une batterie de tests écotoxicologiques aquatiques sur eaux interstitielles et lixiviats de sédiments.