Mise en place de deux réseaux de surveillance des pesticides dans l’air ambiant et les sols wallons
Contexte
En Europe, la Directive 2009/128/EC enjoint les États membres de développer des plans d’actions en vue de réduire les risques et les effets de l’utilisation des pesticides sur la santé humaine et l’environnement.
Malgré ces directives et les bonnes pratiques dont font preuve les utilisateurs de produits phytosanitaires (PPP), la dispersion des pesticides dans l’environnement reste encore peu maitrisée. Les PPP peuvent donc être omniprésents dans nos milieux de vie, causant ainsi des risques pour la santé humaine et la biodiversité.
Actuellement, il existe des réseaux de surveillance des pesticides dans l’environnement pour les eaux de surface, souterraines et de distribution, et une surveillance de l’alimentation, mais aucune surveillance n’existe pour l’air et le sol. Ces réseaux existants se focalisent majoritairement sur l’analyse de pesticides dits « anciens » (et dont beaucoup sont maintenant interdits), alors que des mises à jour régulières des listes de substances à suivre permettent de prendre en compte de nombreuses substances actives (SA) plus récentes et encore agréées.
Bien que certaines substances actives aient été interdites du fait de leurs possibles impacts sanitaires et sur les écosystèmes, certaines SA agréées en Belgique et non suivies dans les réseaux existants, appartiennent à la liste des substances suspectées d’être cancérogène, reprotoxique ou toxique envers certains organes spécifiques après des expositions répétées chez l’Homme. De plus, ces SA peuvent également avoir des effets toxiques aigus et chroniques sur les organismes aquatiques et/ou terrestres.
Il convient donc de mettre en place une surveillance de ces SA dans l’environnement, afin de mieux caractériser et prévenir les risques pour les populations et la biodiversité.
Dans le cadre du 3ème Programme Wallon de Réduction des Pesticides (PWRP3), l’ISSeP est en charge de la fiche action 3.6.1.1.1 qui vise à « Mettre en place une surveillance des risques liés aux pesticides dans l’environnement (eau, air, sol, production agricole) », en abrégé « SuRiPest ».
Objectifs de l’étude
L’objet de cette proposition de surveillance est de mettre en place deux réseaux de surveillance des PPP dans l’air et le sol, et de collecter des données nécessaires à une meilleure évaluation des risques liés aux pesticides dans l’environnement. Cela permettra d’améliorer la prévention de la contamination par les PPP, mais aussi de compléter les évaluations des risques réalisées via les données obtenues dans les réseaux existants. Ces deux nouveaux réseaux permettront également d’évaluer l’efficacité des mesures de réduction de l’utilisation des PPP prises dans le cadre du PWRP.
Description des tâches
Bilan des données de surveillances en Belgique et benchmarking surveillances des PPP à l’étranger :
- Exploiter l’ensemble des données disponibles (ex. rapports CORDER, phytoweb, EU pesticides, …) pour faire un bilan des substances actives autorisées et utilisées en agriculture en Wallonie,
- Hiérarchiser les PPP à suivre sur base de critères physico-chimique, (éco)toxicologique, de vente, d’utilisation, etc., afin de définir une liste de PPP d’intérêt à surveiller,
- Faire un bilan des réseaux de surveillance existants en Région wallonne, en Belgique et à l’étranger (PPP analysés, techniques analytiques employées, protocole d’échantillonnage, …)
Screening préliminaire et prospectif des PPP :
La contamination de l’environnement par les pesticides sera évaluée de manière préliminaire à l’aide d’un screening, réalisé avec le CRA-W, dans les 4 super-région agricoles de Wallonie (Habran et al., 2022) afin d’obtenir une vision globale de la contamination de l’air ambiant et du sol en PPP, sur une période d’un an.
Il s’agira d’analyses non-ciblées d’échantillons d’air ambiant et de sol pour déterminer les PPP retrouvés et possiblement leurs concentrations.
Les résultats des analyses non-ciblées seront comparés à la liste des PPP d’intérêts (étape 1-hiérarchisation), et une réévaluation des PPP à suivre sera envisagée et discutée si nécessaire, de même que les méthodes analytiques à optimiser (ou développer si besoin).
Optimisation de méthodologies analytiques :
Cette étape sera réalisée dans l’objectif de réduire le coût analytique sur le long terme (pérennité du réseau).
Il s’agira de répertorier les PPP d’intérêt ne présentant pas de méthodologies analytiques, à partir du bilan réalisé (étape 1) et du screening préliminaire (étape 2).
Les possibilités d’optimisation analytiques permettant d’atteindre des limites de quantifications pertinentes pour l’étude seront discutées et testées.
Cette réflexion et cette optimisation de méthodes analytiques pourront être réalisées tout au long de la durée du projet selon les besoins. Ces adaptations analytiques se baseront sur l’expérience et les compétences de l’équipe projet (ISSeP et CRA-W) et des données de la littérature scientifique.
Organisation opérationnelle du programme de surveillance des PPP dans l’air et le sol :
L’ensemble des informations obtenues des précédentes étapes permettront d’organiser un programme de surveillance des pesticides opérationnel et le plus pertinent pour les matrices air et sol (nombre d’échantillons à analyser par matrice, nombre de site de prélèvements, fréquence des prélèvements, …).
Suivi récurrent du fonctionnement des réseaux de surveillance PPP dans l’air et le sol, analyses des résultats et rédaction rapport annuel :
Il s’agira de mettre en place les dispositifs et protocoles définis dans l’étape 4 nécessaire aux réseaux air et sol, et de suivre le bon fonctionnement des différentes étapes du réseau (planning de prélèvements, analyses échantillons, analyses des résultats et rédaction rapport).
Mise à jour régulière des bases de données créées (air et sol) avec les nouveaux résultats obtenus.
Des ajustements des réseaux seront apportés si nécessaire et concerneront principalement les sites étudiés, la fréquence d’échantillonnage, le nombre d’échantillons analysés, la liste des PPP à suivre.
Un rapport annuel sera rédigé pour présenter les résultats obtenus dans chacune des deux matrices au cours de la surveillance de l’année précédente.
Résultats attendus
- Mise en place d’un observatoire de la contamination des sols par les PPP
- Mise en place d’un observatoire de la contamination de l’air ambiant par les PPP
Contact
Pour de plus amples informations avant, pendant ou après l’étude, vous pouvez nous contacter :
Caroline Thiry et Eric Gismondi
ISSeP – Cellule Environnement-Santé, 200 Rue du Chéra – 4000 Liège
Email : suripest@issep.be
Partenaire
Centre wallon de recherches agronomiques (CRA-W, Gembloux)
Un acteur au service du citoyen, des consommateurs, de l’économie et de la transition vers une agriculture wallonne plus durable. Le CRA-W combine des fonctions de recherche scientifique, de service et de support au bénéfice des agriculteurs, éleveurs, horticulteurs, sylviculteurs wallons et des opérateurs du secteur agro-alimentaire.
L’Unité 10 du CRA-W contribue à ce projet par l’apport de son expertise dans l’analyse des produits phytosanitaires dans les différentes matrices environnementales. Après avoir réalisé un screening d’échantillons de sol et d’air afin de déterminer les molécules à suivre dans les matrices air et sol, les méthodes analytiques adaptées seront développées.
Financement
PWRP3 – Ministère de l’Environnement, de la Nature, de la Forêt, de la Ruralité et du Bien-être animal
FAQ – Généralités
Actuellement, il existe des réseaux de surveillance des pesticides dans l’environnement pour les eaux de surface, souterraines et de distribution, et une surveillance de l’alimentation, mais aucune surveillance n’existe pour l’air ambiant et le sol.
Le développement de ces deux réseaux permettraient donc de compléter la surveillance environnementale des pesticides mais aussi d’améliorer la surveillance des risques liés à leur présence dans l’environnement.
Dans cette 1ère phase du projet (screening), il n’y a pas de liste définie de molécules à analyser. Les analyses seront réalisées grâce à des méthodes multi-résidus (partenaire CRA-W), dans le but d’identifier les molécules présentes dans l’air ambiant et les sols.
Dans la suite du projet, une liste de substances d’intérêts sera définie selon plusieurs critères (présence/absence, persistance, utilisation, toxicité,…) afin d’être suivi dans chacun des réseaux mis en place.
Non.
Les capacités analytiques actuelles des laboratoire d’analyse ne permettent pas d’analyser toutes les substances actives des produits phytopharmaceutiques.
Un volet spécifique du projet a été prévu afin de développer de nouvelles méthodes analytiques pour augmenter le nombre de molécules analysées.
Aucune évaluation des risques sera réalisée dans la 1ère phase du projet (screening) car aucune concentration ne sera mesurée.
Une fois que le réseau de surveillance opérationnel sera en place, une évaluation des risques sera réalisée sur l’ensemble des résultats obtenus.
FAQ – Volet sol
Pour la 1ère phase du projet (screening), le but est d’identifier les molécules présentes dans les sols wallons pour définir la liste des substances actives a priori d’intérêt.
Pour cela, l’activité agricole étant celle qui utilise le plus de produits phytopharmaceutiques (en quantité et en diversité), les prélèvements seront réalisés sur les 16 cultures principales (représentant environ 82% de la surface agricole utile) afin d’identifier les molécules présentes dans le sol, et donc possiblement d’intérêt pour le réseau de surveillance.
Pour la suite du projet, des prélèvements seront réalisés sur tous les types de terrains (industries, particuliers, parcs, forêts, cimetière, chemins de fer, cultures biologiques, …).
Les 16 cultures principales de Wallonie sont au départ au nombre de 17 mais pour le projet SuRiPest il a été décidé de regrouper les prairies temporaires et permanentes.
Les 16 cultures principales sont les suivantes :
- Avoine d’hiver
- Avoine de printemps
- Betterave fourragère
- Betterave sucrière
- Chicorée
- Colza
- Épeautre
- Froment d’hiver
- Haricot
- Maïs ensilage
- Maïs grain
- Orge d’hiver
- Orge de printemps
- Petit pois et pois vert
- Pomme de terre
- Prairies (temporaires + permanentes)
Ce sont des agents préleveurs agréés de l’ISSeP qui viendront réaliser les prélèvements. Il ne sera pas demandé aux agriculteurs participants de les effectuer.
Cela permettra une interprétation plus juste et plus nuancée des résultats (présence/absence de substances).
Exemple : si une molécule n’est pas détectée alors qu’elle a été pulvérisée sur la culture, cela veut dire qu’elle est soit vite dégradée, soit qu’elle a été transférée rapidement vers les eaux souterraines ou de surfaces. Donc, le risque lié à cette substance dans le sol serait moindre, et donc son suivi dans le réseau de surveillance des sols serait moins pertinent.
Non, le screening recherchera uniquement à identifier les molécules présentes mais pas à les quantifier. Il n’y aura donc pas de mesure des concentrations.
Les analyses permettront de connaître l’identité et le nombre des substances actives présentes pour chacune des 16 cultures principales, et leur persistance dans le sol (prélèvements avant, pendant et après utilisation).
Ces résultats permettront de cibler les molécules d’intérêts à suivre dans le réseau de surveillance des sols.
Comme pour tout projet impliquant des données à caractère personnel, l’anonymat des participants est garanti. De plus, le Data Protection Officer (DPO) de l’ISSeP s’assure du respect du Règlement général sur la protection des données (RGPD).
En effet, seul les agents de l’ISSeP travaillant sur le projet auront connaissance de l’identité des participants et pourront établir un lien entre les résultats les participants. Les laboratoires qui réaliseront les analyses recevront des échantillons identifiés par un code et ils n’auront donc aucune information sur la provenance des échantillons.
Lors de la publication des résultats du screening, la localisation précise des prélèvements ne sera pas indiquée de manière à ne pas pouvoir identifier les agriculteurs participants.
De plus, plusieurs échantillons provenant de parcelles différentes mais de même culture seront mélangés avant analyse. Il ne sera donc pas possible de connaître les résultats pour chaque parcelle individuelle.
Non.
Plusieurs prélèvements seront réalisés sur plusieurs parcelles de même type de culture. Dans la mesure du possible, minimum 2 à 3 parcelles par type de culture seront mélangées avant analyse.
De ce fait, les résultats obtenus ne pourront être attribués à un agriculteur particulier.
Oui, les échantillons seront conservés à -20°C, dans le but d’étudier la durée maximale de conservation des échantillons. Leur conservation permettra également à l’équipe-projet d’effectuer des analyses supplémentaires (confirmation de premiers résultats, recherches de nouvelles substances suite au développement analytique, ….).